Une rencontre
J'ai d'abord vu ses chaussures : d'improbables escarpins rouge vif, d'une hauteur vertigineuse, constellés de strass. Il était environ 4 heures de l'après-midi et je la voyais du coin de l'oeil, de dos, assise dans le tram. N'émergeaient du siège qu'un pantalon noir ultra moulant, la manche d'une veste rouge, des cheveux roux mi-longs parfaitement coiffés, un bout de petit sac noir et or sur les genoux.
Quand elle s'est levée pour descendre, j'ai remarqué qu'elle était très grande, très mince, maladroite sur ses talons aiguilles et qu'il émanait un indéfinissable malaise de sa personne. Je la voyais pourtant toujours de dos. Elle est descendue et s'est alors tournée vers moi ; j'ai immédiatement compris : elle était en fait lui.
Je n'ai pas eu envie ni de sourire ni surtout de me moquer ; l'ensemble était pathétique et dans les yeux de cet homme travesti en femme, marchant à pas comptés il y avait surtout une immense détresse.